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AGROCARBURANTS

Les États européens, pourtant en cure d’austérité budgétaire, ont soutenu à hauteur de 10 milliards d’euros (Md€) en 2011 l'industrie des agrocarburants sous forme d’exonérations fiscales (payées par les citoyens : 5,8 Md€), d’obligations d’incorporations (payées par les automobilistes : 318 - 736 millions € pour l'éthanol et 3,1 - 4,1 Md€ pour le biodiesel) et de financement de la R&D (52 millions €).



Selon l’étude de l'Institut international du développement durable (IISD) intitulée « Biofuels - At What Cost ? A review of costs and benefits of EU biofuels policies1 » , ce financement a été nécessaire pour maintenir les 4,5% de parts de marché des agrocarburants en 2011 - légèrement en dessous du plafond de 5% proposée par la Commission européenne il y a six mois2 . L'étude montre également que ce soutien représente plus de la moitié du chiffre d'affaires 2011 du secteur européen des agrocarburants (compris entre 13 et 16 Md€).

« Selon la Cour des Comptes, l’exonération fiscale dont ont bénéficié les producteurs d’agrocarburants français entre 2005 et 2010 a coûté à l’Etat plus de 2,6 Md€, déclare Clara Jamart d’Oxfam France. Alors que beaucoup de pays européens arrêtent les exonération de taxes, le gouvernement Ayrault a décidé en octobre 2012 de renouveler pour trois ans cette niche fiscale intolérable ».

Des recherches récentes ont déjà montré que la politique européenne de développement des agrocarburants ne réduit pas les émissions de gaz à effet de serre (GES) des transports. En comptabilisant les émissions dues au changement d’affectation des sols indirects3 , les agrocarburants (surtout le biodiesel) émettent même plus de GES que les carburants fossiles !
« Les politiques en faveur des agrocarburants mettent également en danger la souveraineté alimentaire des populations des pays du sud, entraînant accaparements de terres et hausse du prix des matières premières », explique Katia Roux de Peuples Solidaires.

« La transition écologique et sociale de l'agriculture est une urgence, il est impératif d'aider vraiment les modes de production les moins émetteurs de GES et les plus créateurs d'emplois », déclare Stéphanie Pageot, présidente de la Fédération nationale de l'Agriculture biologique

Il apparaît clairement que le soutien aux agrocarburants profite exclusivement aux industriels. Pour protéger le climat et favoriser la création d’emploi, la révision des normes d’émissions de CO2 des voitures est une démarche bien plus rentable et efficace. En effet, les 10 Md€ correspondent à ce qu’il faudrait investir dans le secteur automobile pour fabriquer des voitures rejetant 80 gCO2/km au lieu des 95 gCO2/km en 2020 comme proposé actuellement par la Commission4 .

Pour Diane Vandaele du RAC-F, « Il n’est plus à prouver que miser sur le développement des agrocarburants pour réduire l’impact du secteur des transports sur le climat est une absurdité, alors que soutenir la fabrication de voitures rejetant 80gCO2/km économiserait 40 millions de tonnes de CO2 par an, à un coût quasi nul grâce à la réduction des importations de pétrole et en maintenant des emplois en Europe».

« Dépenser autant d’argent public sans bénéfices environnementaux est insupportable. L’argent doit être mobilisé pour développer de réelles solutions comme l’amélioration de l’efficacité énergétique des véhicules ou le développement du transport ferroviaire » conclut Bruno Genty, président de FNE.

1Etude co-financée par l’IISD, BirdLife Europe, EEB et T&E - http://www.iisd.org/gsi/benefits-eu-biofuel-policies
2Voir la proposition de la Commission
3Processus par lequel les terres utilisées pour l’alimentation sont converties pour produire des agrocarburants. Avec une demande alimentaire stable, la nourriture est produite ailleurs, souvent sur des terres jusqu’alors non cultivées, entraînant une augmentation globale des émissions de GES. Voir la vidéo et le rapport « Anticipated Indirect Land Use Change Associated with Expanded Use of Biofuels in the EU », IEEP (2011)

4Calcul basé sur le rapport de l'ICCT " Mass reduction impacts on EU cost curves " (Fig.14 p20) soit environ 750 € par voiture multiplié par 13 millions d'unités (moyenne historique des ventes annuelle de voitures dans l'UE27).