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Juge indépendant

« Le droit à un Tribunal indépendant et impartial »

 

          La notion de procès équitable, qui résulte de l’article 6-1 de la convention Européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est une notion qui implique le respect d’un certain nombre de droits subjectifs au bénéfice du requérant. Le droit à un Tribunal indépendant et impartial  fait parti de ces droits fondamentaux.

 

          Plus précisément, le Tribunal s’entend de toute formation juridictionnelle ayant pour fonction d'apporter une solution obligatoire à un litige soit entre personnes privées, soit entre une personne privée et une personne publique. L’impartialité et l’indépendance procèdent de l’exigence de neutralité des juges. Il s’agit de permettre aux justiciables de bénéficier de toutes les garanties d’objectivité de la part des personnes qui les jugent.

          La primauté et l’effet direct attachés au Droit communautaire impliquent  le respect de ces principes en droit interne et leur contestation  devant les juges nationaux. C’est ainsi que l’Assemblée plénière de la cour suprême a, dans plusieurs arrêts, explicitement fait référence au droit à un Tribunal impartial en considérant qu’il devait être apprécié objectivement. Ce droit s’oppose à ce qu’un juge qui a alloué une provision en référé puisse connaître du fond du litige, en revanche l’octroi d’une simple  mesure conservatoire n’est pas incompatible avec le principe d’impartialité.

          Il apparaît qu’il n’est pas aisé de déterminer les cas dans lesquels le droit à un Tribunal indépendant et impartial est violé. Que revêt la notion et comment est-elle protégée ?

          Il convient dés lors de s’interroger sur le contenu  du  droit à un Tribunal indépendant et impartial, avant de s’intéresser à  sa mise en œuvre.

 

                  Le contenu du droit à un Tribunal indépendant et impartial

 

          Le Tribunal doit être indépendant (A) et impartial (B). 

 

A.  Un tribunal indépendant

 

          Un Tribunal indépendant s’entend d’un Tribunal qui rend une décision de son propre chef sans demander à une autre juridiction de se substituer à lui. Il doit être indépendant vis-à-vis des autres juridictions (CEDH 24 nov 1994 BEAUMARTIN et 12 fev 2003 CHEVROL).

          Le Tribunal doit également être  indépendant vis-à-vis de l’état de son for  et vis-à-vis des parties au litige. Le principe d’inamovibilité de la magistrature assure cette indépendance. Cependant, les lois qui sont rétroactives ou les lois de validation peuvent porter atteinte à ce principe d’indépendance par l’intervention du pouvoir législatif dans les procédure sen cours. La Cour européenne des droits de l’homme a ainsi précisé dans sa célébré jurisprudence ZIELINSKI de 1999 qu’une loi de validation ou une loi rétroactive n’était possible que pour « d’impérieux motifs  d’intérêt général » et que tel n’était pas le cas en l’espèce s’agissant de la Loi n°  94-43 du 18 janvier 1994 « relative à la santé publique et à la protection sociale ».

          Les juges doivent enfin  être indépendants vis-à-vis des parties. Cela signifie en pratique que les relations entre les parties et le juge sont strictement régies par les dispositions du nouveau Code de procédure civile. L’indépendance signifie également que le juge qui a un intérêt personnel dans un litige ne peut juger. Par exemple, un conseiller prud’homal salarié ne pourrait juger un autre salarié de l’entreprise sans laquelle il travaille.

         

          L’autre pan du droit à un à un Tribunal indépendant et impartial concerne l’impartialité (B).

 

B.  Un Tribunal impartial   

 

          L’exigence d’impartialité est une notion qui doit s’apprécier objectivement. Cela implique une présomption d’impartialité au bénéfice des juges ; il en va du respect d’une bonne administration de la justice. (sauf que que dans de nombreux pays d'Europe, les juges et les magistrats du ministère public sont souvent très proches et non indépendants les uns des autres). Pourtant cette exigence ne s’applique qu’aux juges et non au ministère public et n’est pas incompatible avec le droit de se saisir d’office.

          Plus précisément, cela signifie qu’un juge ne peut être à la fois juge et partie, il ne peut instruire une affaire et la juger ou avoir des fonctions consultatives et contentieuses successivement dans un même litige (CEDH 28 sept 1995 PROCOLA)   et enfin  il ne peut connaître du recours en révision contre sa propre décision. Ces principes connaissent quelques tempéraments puisque le juge de la mise en état nommé dans une procédure dite longue peut parfois dans certains pays participer aux débats au fond.

          La jurisprudence tant interne que communautaire est assez abondante sur la notion d’impartialité. C’est ainsi qu’est considérée comme une atteinte au principe d’impartialité le fait qu’un même juge, quelles que puissent en être les modalités procédurales, ne peut connaître d’un recours afférent à une décision qu’il a précédemment rendue, le juge qui a eu à se prononcer sur la bonne foi du débiteur ne peut ensuite connaître du recours formé par celui-ci contre la décision de la Commission de surendettement déclarant irrecevable sa demande.

          En revanche, ne constitue pas une telle atteinte, le fait qu’un arrêt ayant statué sur une instance civile ait été rendu par des magistrats au nombre desquels figurait le juge d’instruction ayant connu de l’affaire sur le plan pénal. (cette question reste sensible)           

          Exiger la protection du droit à un Tribunal indépendant et impartial doit amener à s’intéresser à la sanction de son non respect.

 

 

              La sanction du non respect du droit  à un Tribunal impartial

 

           La sanction majeure est la récusation du juge (A) et cette sanction s’applique également aux autres membres du Tribunal (B).

 

A.  La récusation du juge

 

          La récusation n’est admise que pour les causes déterminées par la  Loi :

« 1º Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;
   2º Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une des parties ;
   3º Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;
   4º S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
   5º S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;
   6º Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;
   7º S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;
   8º S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ».

            La partie qui souhaite récuser doit le faire dès qu’elle en a connaissance et avant la clôture des débats. Les motifs précis de la récusation doivent être indiqués dans la demande.

          Si la récusation est admise, le juge est remplacé, à défaut l’auteur de la demande peut être condamné à une amende civile et à des dommages intérêts. 

          La cour suprême admet que la récusation puisse être fondée sur l’article 6-1 de la convention Européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Ceci élargit d’autant les cas de récusation mais les jurisprudences sont assez timides pour admettre la récusation.

          La récusation  est également prévue pour les autres membres du Tribunal (B).

 

B.  La récusation étendue   à tout le Tribunal

 

          « Le ministère public, partie jointe, peut être récusé dans les mêmes cas ». L’ensemble du Tribunal est ainsi concerné par les exigences d’indépendance et d’impartialité : les membres du parquet, les experts judiciaires et  les membres du jury.

          Ainsi, l’ensemble de ces personnes peuvent être révoquées si un motif objectif de partialité ou de dépendance peut leur être reproché. Ainsi par exemple, les relations familiales entre l’expert et l’un des membres du syndicat de copropriété constituent une amitié notoire. Les jurisprudences sont cependant peu enclines à admettre la récusation d’un technicien.

          Les exigences d’indépendance et d’impartialité qui concernent l’ensemble du Tribunal procèdent  de l’idée d’une bonne administration de la justice.