Actuellement on dit du JUGE D’INSTRUCTION :
- que c'est un magistrat indépendant : ................................?
Parce que, contrairement aux magistrats du parquet, le juge d’instruction relève de la magistrature du siège, et ils sont dotés d’un statut qui devrait garantir pleinement leurs indépendances, tant au regard du pouvoir politique que des autres pouvoirs. Est ce suffisant?
Cette indépendance statutaire permet au juge d’instruction de pouvoir mener ses enquêtes avec un seul objectif en vue, celui de la recherche de la vérité.
Contrairement au Procureur de la République, il n’est pas tributaire d’un pouvoir politique. Et il n’a pas à prendre en considération les préoccupations ou intérêts des élus locaux, des autres administrations régionales, ni du caractère médiatique ou non d’une affaire.
Le Juge d’instruction a officiellement une seule mission : rechercher la vérité dans le cadre des règles fixées par le code de procédure pénale. Mais est ce possible à lui tout seul? NON
- il doit effectuer un travail à charge et à décharge :
Conformément à l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, le juge d’instruction est tenu d’instruire à charge et à décharge, c’est à dire :
-d’une part de recueillir tous les éléments pouvant impliquer un justiciable dans la commission d’infractions ;
-d’autre part de vérifier les alibis avancés par une personne mise en cause ou la réalité de ses explications ou encore de faire droit à ses demandes d’actes et de réaliser celles-ci avec les mêmes diligences que tous les autres actes du dossier.
-il doit également rechercher tous les témoignages, sans essayer d'en supprimer parce qu'ils ne lui conviendrait pas pour mener son instruction. il doit également vérifier la qualité de tous les témoignages.
- l’égalité des justiciables dans la défense de leurs droits :
L ‘obligation pour le juge d’instruction d’instruire à charge et à décharge conduit à établir une égalité des justiciables dans la défense de leurs droits.
En effet, la vérification des alibis ou les mesures de contre-expertise ne devraient pas être, par exemple, tributaires d' influences extérieures.
-l’introduction du principe du contradictoire avant la saisine de la juridiction de jugement :
L’existence d’une véritable phase d’instruction rend obligatoire l’introduction du principe du contradictoire dès la phase de l’enquête et avant la saisine de la juridiction de jugement. Pensez vous que ce débat contradictoire est toujours effectifs? NON
En effet, dès sa mise en examen ou sa constitution de partie civile, le justiciable devrait avoir accès au dossier, mais en réalité ce n'est que son avocat qui a ce droit. Et suivant les finances du justiciable, l'avocat de ce dernier est plus ou moins motivé pour consulter un dossier épais, et de ce fait ne tient pas informé son client du contenu de ce dossier, et il s'en tient à la version résumée par la partie adverse.
-avoir connaissance de l’ensemble de la procédure ; c'est indispensable pour que tout justiciable puisse défendre ses intérêts, mais qu'en est t' il?
-faire des demandes: d’actes, de contre-expertises ou présenter ses observations sur l’interprétation des faits ; l'est aussi indispensable, mais pas toujours réalisé.
déposer des requêtes en nullité ; si nécessaire aussi.
préparer sa défense en vue de l’audience de jugement. C'est très important et impossible pour tout justiciable qui n'a pas eut ces droits, énumérés ci dessus, respectés.
L’absence du principe du contradictoire au cours de la phase d’instruction est particulièrement attentatoire aux droits des parties et empêche l’équité du procès à venir.
L’exemple des enquêtes préliminaires menées intégralement sous le contrôle du parquet et conduisant à une saisine du Tribunal correctionnel par citation directe en est un exemple très clair. En effet, dans ce cas, souvent rencontré dans les enquêtes de nature financière, le justiciable, qu’il soit mis en cause ou victime, n’a accès au dossier qu’une fois la juridiction saisie. Cet accès tardif au dossier, à l’issue de l’enquête, ne lui permet plus de se défendre utilement, ni de combattre efficacement la présentation à charge d’une procédure. En outre il conduit inévitablement à un accroissement de la durée de la phase de jugement.
-le cumul des pouvoirs d’enquête et des pouvoirs juridictionnels :
Le juge d’instruction est à la fois un directeur d’enquêteurs et un juge avec des pouvoirs de nature juridictionnelle.
Il s’agit ainsi d’une procédure d’inspiration inquisitoire.
C'est un directeur d’enquête et d'enquêteurs :
Parce que le juge d’instruction remplit le premier rôle dans la conduite de l’enquête et la recherche des preuves. Il dirige les services de police, saisit par commission rogatoire.
De façon pratique, celui-ci est tenu, tout au long de l’information judiciaire, de :
-être informé de tous les actes effectués par les services de police ;
-prendre toutes les décisions importantes relatives aux gardes à vue, aux perquisitions, aux surveillances, aux principales réquisitions ; -veiller à la stricte application, par les enquêteurs, des règles de procédure pénale et à défaut de leur retirer tous pouvoirs d’enquête, en demandant notamment la clôture de la commission rogatoire.
Le juge d’instruction a, par ailleurs, pour mission d’ordonner toute commission d’experts pour les questions d’ordre technique ou scientifique et de procéder aux auditions et interrogatoires les plus importants : ceux des personnes mises en examen, des plaignants ou parties civiles ou encore des principaux témoins.
-un juge doté de pouvoirs de nature juridictionnelle :
Le juge d’instruction est appelé, au cours d’une information judiciaire, à exercer des pouvoirs exorbitants et de nature juridictionnelle : -autoriser des perquisitions dans des locaux protégés par le secret professionnel et les réaliser lui-même (perquisitions dans des cabinets de médecins, d’avocats, dans les entreprises de presse, etc.) ;
-autoriser des interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications (par exemple des écoutes téléphoniques) ; -se prononcer sur la mise en examen des personnes mises en cause ;
- intervenir de façon importante dans la détention des personnes mises en examen.
Ainsi le Juge d’instruction revêt une double casquette. Si cette dernière pose peu de difficultés dans la majorité des affaires, cela peut en être autrement lorsqu’il s’agit de procédures particulièrement complexes et volumineuses. En effet, du fait de son engagement dans la recherche des preuves et les investigations, le juge d’instruction peut perdre sa nécessaire impartialité, et il la perd très souvent dans l’exercice de ses pouvoirs de nature juridictionnelle :
il manque de recul dans l’appréciation des indices graves et concordants réunis contre une personne avant sa décision de mise en examen ;
Il manque d’objectivité dans l’appréciation du caractère indispensable d’un maintien en détention ou d’une mesure de perquisition.
-l’absence de véritables débats avant le stade du jugement :
L’essence même du procès et de la justice dans son ensemble est de faire émerger la vérité après un débat entres les différentes parties. Le juge est appelé à trancher un conflit, pénal ou civil, après avoir recueilli l’avis de chacun et après confrontation des arguments et griefs réciproques, entre un demandeur ou un défendeur au civil ou entre l’accusation et la défense au pénal. Le débat est ainsi la condition essentielle de la manifestation de la vérité.
Compte tenu de son inspiration inquisitoire, la phase actuelle de l’instruction d’un dossier pénal par le juge d’instruction ne connaît pas de véritables débats contradictoires.
En effet, les décisions de mise en examen, de placement sous contrôle judiciaire, de renvoi ou de non lieu, et d'autres: sont prises après simple avis écrit et facultatif des parties.
La mise en examen n’est pas, par exemple, précédée d’une confrontation réelle entre les arguments du parquet et ceux de la défense, mais d’un simple avis écrit du premier, se limitant souvent à une courte mention, et de brèves observations orales du second au cours de l’interrogatoire de première comparution. Seules les décisions relatives à la détention sont désormais précédées d’un débat devant le juge des libertés et de la détention, entre le Procureur de la République et l’avocat de la personne mise en examen.
Encore faut il souligner qu’il s’agit en l’espèce d’un débat tronqué puisque le personnage central, à savoir le juge d’instruction, ne participe à celui-ci que sous la forme d’un avis préalable émis par une ordonnance de saisine qu'on peut qualifier de définitive.
Ainsi l’absence de véritables débats sur les questions essentielles de la phase de l’instruction, mise en examen, placement en détention, renvoi ou non lieu, ou autres, peut nuire, et nuit souvent à la manifestation de la vérité des faits.
Il est très regrettable de devoir attendre la saisine de la juridiction de jugement, pouvant intervenir plusieurs mois ou années après l’implication d’une personne, pour voir naître ces nécessaires débats.
- la complexité et la lourdeur de la procédure actuelle :
Les réformes successives de la procédure pénale, particulièrement nombreuses au cours de ces dix dernières années dans de nombreux pays d'Europe, ont contribué à rendre très complexes certains points de droit et à allonger considérablement la durée des informations judiciaires, voire à les paralyser.
-l’absence de collégialité dans les décisions relatives à la détention :
Les décisions relatives à la détention provisoire des personnes mises en examen sont particulièrement délicates et nécessitent des garanties efficaces. La collégialité se présente comme la première d’entre elles. Elle n’est pourtant pas prévue pour les décisions du premier ressort.
L'intuition du juge conditionnée par la situation familiale, professionnelle, ou matérielle du prévenu, c'est malheureusement cette intuition qui est suivie par le juge.
-l’absence de motivation dans les décisions de mise en examen :
Dans le prolongement du principe du contradictoire, il importe que les décisions de mise en examen, c’est à dire de mise en cause officielle par une autorité judiciaire d’un justiciable dans la commission d’une infraction, soient motivées de façon précise. Cette obligation doit avoir également pour corollaire la possibilité, pour la personne concernée, de faire appel de cette décision.
Or, actuellement, le juge d’instruction n’est pas soumis à une telle obligation, en tous cas lors de la mise en examen initiale. Les avocats de la défense se plaignent de façon constante de ne pouvoir discuter des éléments ayant conduit le juge d’instruction à placer une personne sous le statut de mis en examen.
-la durée des instructions :
S’il peut être envisagé, dans des situations exceptionnelles, qu’une information judiciaire dure plusieurs années, le délai entre l’ouverture d’une instruction et la première audience de jugement ne devrait pas, de façon générale, excéder les délais préconisés par la Cour Européenne des Droits de l'Homme. En pratique, ces délais sont très souvent dépassés.