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LES VIOLENCES A PERSONNE
OU L'ATTEINTE A L’INTÉGRITÉ PHYSIQUE OU PSYCHIQUE DE LA PERSONNE
Les atteintes à l'intégrité de la personne sont à la fois une infraction prévue et réprimée
Elles sont génératrices de blessures qui doivent diagnostiquées par un médecin, qui doit les soigner, et dont il doit témoigner par le certificat qu'il remettra au patient.
Ce certificat permet au patient d'attester de la réalité des blessures devant les juridictions. Il fait partie des éléments qui permettront la sanction éventuelle de l'auteur, mais aussi l'indemnisation du blessé.
L'abord de la question des violences aux personnes peut se faire selon plusieurs modes qui peuvent se recouper:
A – Aspect pénal
Le Code Pénal distingue les violences volontaires, les violences involontaires et les agressions diverses. Dans chaque catégorie, le Code Pénal définit des "circonstances aggravantes", c'est-à-dire des circonstances qui alourdissent la peine encourue, à gravité de blessures égale.
Les circonstances aggravantes sont définies :
- par la vulnérabilité de la victime : mineur de quinze ans, personne qui, du fait d'une altération due à l'âge, la maladie, une infirmité, une déficience physique ou psychique, ou d'un état de grossesse, ne peut se défendre.
- par la qualité de la victime : personne dépositaire de l'autorité publique (magistrat, policier…), témoin, partie civile.
- par le lien entre la victime et l'agresseur : les violences entre époux, d'ascendant sur mineur, d'employeur sur employé, sont sanctionnables plus sévèrement.
- enfin lorsque l'auteur n'est pas unique, c'est-à-dire lorsqu'il y a plusieurs agresseurs pour une seule victime, il s'agit également d'une circonstance aggravante.
B - Point de vue médical
Pour le médecin, la première préoccupation doit être le soin du blessé. Certes, les circonstances de survenue des blessures ne peuvent être ignorées : le retentissement d'une même blessure ne sera pas le même pour le blessé, s'il s'agit d'un accident provoqué par lui-même, par un tiers ou d'une agression.
1 – Abord de la personne victime de violences.
Toutes les réactions psychologiques et comportementales sont possibles après un évènement violent : stupeur, prostration, agitation désordonnée, ou au contraire besoin d'agir, de penser de manière très rationnelle… Parfois aussi, le blessé focalise son attention sur un détail qui peut paraître secondaire à autrui.
La personne victime de violences est avant tout quelqu'un pour qui l'impensable vient de se produire, l'imprévu est survenu, et, en quelques fractions de secondes, les certitudes, les assurances sont remises en cause. La gravité objective des blessures n'est pas corrélée à l'intensité de l'état émotionnel. Un incident mineur peut venir révéler de manière extrêmement traumatisante à un sujet, que lui aussi peut avoir un accident, être agressé: bref, qu'il est vulnérable.
Certaines agressions se déroulent sans violences physiques, du fait d'une emprise psychique de l'agresseur sur la victime. Ces agressions sont, de par leur nature et la négation de l'autre qu'elles véhiculent, extrêmement mortifères.
Dans la quasi totalité des cas, la victime éprouve un sentiment de culpabilité, plus ou moins présent à sa conscience, qui peut générer des comportements de défense, éventuellement agressifs ou revendicateurs.
L'état de stress d'une victime de violence est très variable selon la personnalité, mais aussi les circonstances de survenue.
Il n'est pas possible de préconiser une conduite à tenir pour l'accueil des victimes de violences, du fait même de la variabilité des symptômes. On ne peut qu'encourager le médecin à accepter cette diversité de réactions, à avoir présent à l'esprit que la personne qu'il examine a vécu un évènement potentiellement traumatisant et que la réaction psychologique dépend autant de la personnalité, des circonstances… que de la capacité d'écoute du médecin. Il n'est pas question de faire des entretiens de psychothérapie là où ils n'ont pas lieu d'être, mais d'accepter d'entendre que la gravité objective des faits et de leurs conséquences, leur importance pour le patient sont grandes, et qu'il se sent lui, meurtri parfois humilié, même si les blessures sont minimes (certaines insultes sont parfois vécues plus douloureusement que les coups).
Le médecin joue un rôle important, surtout pour les lésions bénignes, qui, paradoxalement, sont peut-être celles auxquelles il faut consacrer le plus de temps : expliquer pourquoi ce n'est pas grave, prévenir que les douleurs vont sans doute persister quelques jours, voire quelques semaines, expliquer pourquoi on fait ou non une radio… La prise en charge par un victimologue doit commencer tôt, et ne doit être que le fait du spécialiste en victomologie.
2. Les soins aux personnes victimes de violences
Ils relèvent de la pratique médicale enseignée. Par ailleurs Ils doivent toujours rester la priorité du médecin, et leur place réelle dans la prise en charge est inversement proportionnelle à celle qui leur est consacrée dans cet exposé.
3. L'approche médico-légale
Les descriptions des blessures et la rédaction du certificat dit de coups et blessures, sont trop souvent vécue, soit comme une formalité, soit comme un acte au-dessus de ses capacités, par le médecin. Il n'en est rien.
Nous avons vu que ce certificat médical permettra d'authentifier les blessures lors du dépôt de plainte. Avec ce document, le blessé ne prouve pas seulement la réalité des blessures, il peut aussi permettre de contribuer à la détermination de la vérité (au sens judiciaire du terme, du déroulement des faits : chronologie, positions des protagonistes…).
Le certificat, dès lors qu'il est remis aux autorités judiciaires, devient une pièce de procédure à part entière.
Ce certificat doit permettre à l'expert de déterminer le mécanisme des blessures. Il permettra ensuite l'indemnisation du blessé : seules, les séquelles directement imputables au fait concerné pourront être indemnisées. De l'exhaustivité et de la précision du certificat initial dépendront la qualité et l'exactitude, c’est à dire le caractère juste, de l'indemnisation, c'est-à-dire de la reconnaissance par l'auteur et la collectivité, de la réalité du préjudice subi par la victime.
On voit donc que la description minutieuse des blessures participe à la prise en charge du blessé :
- elle témoigne de l'attention que l'on porte à ses blessures,
- et lui permet de les faire reconnaître.
3.1 Les blessures :
"La blessure est la marque dans les cellules, les tissus ou les organes, d'un fait traumatique qui a agressé l'individu".
a -Différents types de blessures :
Les différents types de blessures ont des définitions précises, et le médecin aurait tout intérêt à utiliser les termes de manière aussi rigoureuse que possible.
3.2 Gestes médico-légaux propres à certaines situations :
La recherche des preuves :
C'est là parfois un aspect un peu plus déroutant pour le médecin.
Enfin, dernier cas particulier, le harcèlement moral.
Le harcèlement moral est un comportement qui vise à déstabiliser autrui, par des humiliations et déstabilisations délibérées et permanentes. Il ne s'agit pas, comme on l'a dit parfois, d'une simple exigence d'un supérieur sur un subordonné, mais d'une véritable stratégie visant à amener l'autre au bord de la rupture.
Conséquences juridiques des blessures :
a) Certificat médical et incapacité totale de travail :
Si le certificat de constat de blessure doit être particulièrement minutieux et détaillé, il ne se limite pas à ce travail de description. En effet, une de ses fonctions, outre authentifier l'existence des blessures auprès du magistrat, est de permettre à celui-ci de qualifier l'infraction.
Le système juridique français repose sur une hiérarchie dans la gravité des infractions.
Les moins graves, les contraventions, relèvent du tribunal de simple police. Les peines encourues sont des amendes ou des "restrictions des libertés".
Les délits sont jugés par le Tribunal Correctionnel. Les peines encourues sont l'amende, et/ou l'emprisonnement jusqu'à 10 ans.
Les crimes sont jugés par les Cours d'Assises, et la peine encourue est la réclusion criminelle.
C'est à partir de la gravité des blessures, quantifiée par le médecin, que le Procureur de la République détermine de quelle juridiction dépend l'affaire en question. Ce critère n'est pas le seul : nous avons vu plus haut qu'il existe d’autres éléments, les "circonstances aggravantes", qui participent aussi à cette décision.
Cette quantification se fait à travers la détermination de l'incapacité totale de travail .
Ce terme très général induit une confusion. Le travail dont il est question ici est le travail de la vie quotidienne, c'est-à-dire que ce qui est pris en compte, est une perte de la capacité à effectuer les actes fondamentaux de la vie quotidienne : s'habiller, se laver, se nourrir seul. L'activité professionnelle entre en ligne de compte dans la prescription éventuelle d'un arrêt de travail, mais en principe n'intervient pas dans la détermination d'une ITT.
L'incapacité totale de travail concerne :
une incapacité : qui est une impossibilité physique ou psychique à réaliser certains actes.
totale : il ne s'agit pas d'une incapacité absolue, et il suffit que l'autonomie de la personne soit gravement entravée par les blessures. Point n'est besoin d'exiger qu'elle soit complètement alitée et immobilisée.
de travail : il s'agit bien d'un travail corporel, musculaire, psychique et non pas professionnel.
Il est important de noter que nous parlerons ici de ce que l'on appelle ici l'ITT pénale, c'est-à-dire l'incapacité totale de travail, mentionnée dans le Code Pénal comme l'élément déterminant de la qualification des infractions.
Selon le cadre dans lequel on se situe, le même sigle ITT peut avoir d'autres significations : l'incapacité temporaire totale des procédures civiles et l'incapacité totale de travail des juridictions sociales ne recouvrent pas les mêmes réalités ni les mêmes définitions que l'incapacité totale de travail pénale dont nous parlons ici.
Enfin, cette incapacité s'exprime en jours.
Il nous est arrivé à plusieurs reprises que des personnes se présentent comme victimes tout à fait passives d'une agression, et de recevoir quelques jours après l'autre interlocuteur de cette agression : il apparaissait clairement que les rôles n'étaient pas aussi clairement définis que la première victime nous l'avait décrit. Prolonger une ITT pour rendre service à une victime revient pour le médecin à prendre position dans un conflit dans lequel il n ‘a aucun rôle à tenir, et dont il ne connaît pas les tenants et aboutissants. La seule position acceptable, mais la plus difficile, est celle d’une évaluation aussi juste que possible, sur des critères médicaux.
Il importe donc de prendre la parole du patient pour ce qu'elle est, mais décider si la personne que l'on a en face de soi est une victime qui doit être "aidée" y compris au moyen d'une ITT prolongée, ne relève pas du rôle du médecin, mais du rôle des enquêteurs.
L'ITT doit être estimée de façon aussi médicale que possible.
La difficulté à laquelle se heurte souvent le médecin est l'absence de barème qui relierait un type de blessure et une ITT. Cette absence de barème est tout à fait dans la logique du système juridique européen. En effet, ce qui fait la gravité d'un geste, ce n'est pas tant le geste, que ses conséquences sur la victime. Il est clair qu'à blessure égale, les conséquences ne sont pas les mêmes selon la victime, et c'est bien pour cela qu'il appartient au médecin de chiffrer ces conséquences. En d'autres termes, un barème qui ferait correspondre à un type de blessure, une ITT serait un non-sens.