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ABUS de FAIBLESSE, NON

Le 13 mai 2013, une centenaire, était venue dire à sa façon à la justice de lui ficher la paix.

Assise sur une chaise roulante, la vieille dame, quoique quasiment aveugle et sourde d’une oreille avait malgré tout clairement exprimé son indignation en demandant qu’on la laisse disposer de son argent comme bon lui semblait.

Et qu’on cesse d’importuner son voisin qui l'aide finir sa vie chez elle, alors que le procureur de la République poursuivait ce voisin pour abus de faiblesse.

Tous ses problèmes n’ont pas été résolus d’un coup. Mais la centenaire ne s’est pas déplacée au tribunal pour rien.

LUCIDE

Ce lundi 13 mai, la présidence d'une chambre correctionnelle, a relaxé le voisin samaritain, à qui la centenaire avait donné en 2012 près de 235 000 euros sous forme de quatre chèques, soit la moitié de ses économies.

La vulnérabilité physique ne suffit à caractériser l’abus de faiblesse.

Ce dernier suppose que soit démontrée l’existence des pressions graves ou réitérées ou des techniques propres à altérer le jugement de la personne concernée afin de la conduire à des actes lui étant gravement préjudiciables.

Tel n’est pas le cas si l’on se fie aux nombreux témoignages recueillis lors de l’enquête déclenchée par le parquet après un signalement de la Banque.

Les notaires qui ont enregistré le testament de Marcelle Carreau et le Centre communal d’action sociale attestent de sa parfaite lucidité mais aussi de son fort caractère.

Son médecin de famille, le docteur M...,  relève que ses conditions de vie se sont bien améliorées depuis que ce voisin samaritain s’occupe d’elle. Un constat partagé par le personnel soignant qui en se relayant autour d’elle rompt son isolement.

·                                 Expertise balayée

Autant d’éléments qui ont conduit le tribunal à faire litière de l’expertise du psychiatre. Qui après avoir constaté une double vulnérabilité, physique et psychologique, ce médecin psychiatre avait évoqué, le syndrome de Stockholm. À l’image de ces otages qui avaient fini par sympathiser avec leurs agresseurs, la centenaire, habilement placée sous emprise, ne pouvait selon lui, plus rien faire sans en référer à son voisin samaritain.

« Il n’est pas établi que la centenaire, eu égard à son grand âge, se soit livrée à des actes lui étant gravement préjudiciables, son hébergement étant acquis, ses ressources mensuelles de 2 500 euros assurés et ses frais médicaux pris en charge à 100 % par la caisse des notaires », soulignent les magistrats dans les attendus de leur décision.

·                                 Tutelle ruineuse

Ancien informaticien reconverti dans la photo, le voisin samaritain connaît la centenaire depuis plusieurs années. Mais, il ne s’occupe d’elle que depuis 2012. Après sa première hospitalisation, il a fait nettoyer sa maison avant de solliciter une association d’aide à domicile et de lui acheter sur ses propres deniers un lit médicalisé. « À ce moment-là, j’ignorais tout de sa fortune personnelle », assure-t-il.

Il n’a fallu que quelques mois au bon voisin Samaritain pour devenir l’héritier de la vieille dame et bénéficier de la moitié de son bas de laine, ce qui lui a permis de solder un emprunt immobilier. La rapidité avec laquelle sont intervenus ces dons n’est pas étrangère aux poursuites lancées par le procureur. Des poursuites du parquet, aujourd’hui jugées infondées. « Les magistrats ont pris peur du fait des nouveaux soucis physiques en accélérant ses choix personnels », insiste le tribunal tout en observant que les circonstances ont entraîné les deux notaires habituels de la centenaire à régulariser un mandat de gestion.

Alors que l’accompagnement mis en place par le voisin samaritain était financé par les ressources de la centenaire, l’association tutélaire du bassin d’Arcachon, qui prend en charge depuis la mise en mouvement de cette procédure judiciaire, la centenaire, évalue à 17 000 euros mensuels le coût de la prise en charge. « Cela revient en tout état de cause à la priver à très court terme de sa maison et de ce à quoi elle aspire, (c'est à dire vivre librement sa fin de vie dans sa maison), s’indigne le tribunal.

Cet organisme met en péril son bien-être. »

Même s’il est susceptible d’être frappé d’appel, ce jugement risque fort d’intéresser les avocats et les personnes désireuses de vivre leur fin de vie à domicile. Les enjeux ne sont évidemment pas tous les mêmes. Reste que certaines des personnes mises en examen pour abus de faiblesse à la suite d’une expertise médicale, à l’image du voisin samaritain, ne cessent de clamer elles aussi qu’elles sont innocentes.